jeudi 30 octobre 2014

Whitechapel, de Sarah Pinborough

En ces temps de fêtes des monstres, des esprits et des défunts, rien de tel qu'un livre bien sombre pour entretenir l'atmosphère... Si l'auteur m'avait particulièrement charmé avec ses réécritures de contes, j'avais plus d'inquiétudes à la découvrir dans un autre genre, le fantastique - horreur. Pari risqué, surtout en reprenant le poncif de Jack l'éventreur...

Et l'auteur m'a une fois de plus impressionné. Plutôt que d'écrire un énième volume sur le tueur de prostituées, Sarah Pinborough s'est plongée dans l'époque, la galerie de personnages du lieu, en y ajoutant d'autres éléments (récits folkloriques, l'influence subtile de de Conan Doyle, les pogroms en Europe de l'Est,..) pour créer quelque chose d'original, de furieusement angoissant et de dramatiquement impossible à poser.

Pour être plus précis, Pinborough a fait au roman gothique (Dracula,...) ce qu'elle avait fait aux contes : elle y plonge, les actualise et y travaille à coups de scalpel leur psychologie, sans sombrer dans un inventaire émotionnel exagéré. Tout est juste, tout est propice à plonger dans l'ambiance, tout est angoissant.
Chapeau bas, donc, car l'exercice était difficile et que je me serai contenté d'une performance moyenne au vu du risque. Le roman gothique, si désuet mais si agréable à mes yeux, reprend ici vie et couleur, tout en gardant un travail d'ambiance et un vocabulaire oppressant qui en ont fait le succès. A lire au coin du feu, quand le vent souffle dehors...

Bird Box, de Josh Malerman

Ma critique de ce livre est l'occasion pour moi de me poser quelques questions sur le fait de donner son avis sur un livre, ainsi que sur l'étendue et la diversité de la littérature en général. Commençons par mon avis et ensuite je bavarderai allègrement sur le reste. 
Soyons clairs, je n'ai pas vraiment apprécié Bird Box. Les motifs du récit sont intéressants mais pour  moi il y a un manque d'alchimie, un défaut de liaisons entre les différents éléments qui m'empêche de m'immerger dans l'histoire et d'en tirer un sens. Je trouve aussi le récit trop épisodique, trop découpé et fragmentaire, avec des intrigues secondaires lancées comme des bouteilles à la mer mais jamais ouvertes. Il y aurait tant eu à raconter, tant de détails à explorer, mais l'auteur est resté à la surface. 
C'est clairement un choix de l'auteur, une manière pour nous, comme pour le personnage principal, d'avoir les yeux fermés. Il n'y a pas ici de maladresse, plutôt une volonté de cacher des choses au lecteur, jusqu'au bout et sans résolution possible. Même si je refuse l'idée que tout doit être expliqué dans un livre, une telle privation est trop forte pour moi. Bref, je n'ai pas aimé. Dommage...

Je dis dommage car les critiques positives pleuvent sur ce titre, notamment dans la blogosophère. Alors, ai-je raté quelque chose, suis-je un vieux geignard, suis-je trop difficile ? Oui et non. C'est tout l'intérêt de la littérature : l'humanité aime des choses aussi diverses qu'il y a d'individus et la manière dont nous apprécions une bonne histoire diffère d'un lecteur à l'autre. Même si je n'ai pas aimé, je n'hésiterais pas à le conseiller à quelqu'un qui  ne souffrirait pas des mêmes prérequis que moi. Si nous aimions tous les mêmes livres, il n'y aurait guère de titres sortis en librairie. Et quand un titre devient un best-seller, il ne fait pas couler les autres, bien au contraire, il permet aux éditeurs d'en pousser d'autres qui n'auraient pas vu le jour par manque de fonds. Même si parfois j'ai du mal à comprendre comment certains livres ont du succès, ce n'est pas une raison pour déprécier ces titres ou leurs lecteurs. Une leçon qu'il est parfois bien nécessaire de se rappeler (à moi  notamment)... sur ce,  bonne lecture... Mais pour mon moment frisson, j'irai plutôt lire Whitechapel, chez Bragelonne.

samedi 11 octobre 2014

La splendeur de Cavendon Hall, de Barbara Taylor Bradford

Si on peut accuser l'éditeur (les Presses de la Cité) d'avoir profité du succès de la série "Downton Abbey", on ne pourra certainement pas les remercier de nous avoir donné quelque chose pour nous occuper en attendant la prochaine saison.
En effet, ce roman légèrement historique est certainement pour un des plus  mauvais que j'aie jamais lu. A chaque page, mon cœur saignait de douleur en voyant à quel point toute possibilité d'amélioration du récit était systématiquement détruire pat l'auteur. Si on reproche souvent à G.R.R. Martin d'être cruel avec ses lecteurs, il est ici relégué au rang de petit chaton mignon par Bradford, qui devrait être poursuivie pour cruauté intellectuelle.

Je m'explique, et j'ajoute que cette explication peut servir de justification pour lire cet ouvrage. En effet, je le conseille à tout apprenti-écrivain qui veut étudier l'art de l'intrigue et de la structure. Bradford démontre ainsi son talent indéniable pour annihiler tout espoir de suspense. Cela n'arrive pas qu'une fois, mais à chaque page. Dès qu'un imprévu intéressant apparaît au fil du récit, elle l'écrase comme un vilain cafard à la page suivante, afin de mieux retomber dans une mièvrerie digne du pays des Bisounours. Et pourtant, c'est qu'elle en a des idées ! Mais je ne peux douter que cette éradication de bébés-intrigues, secondaires ou non, soit volontaire, au vu de l'ampleur du massacre.
En l'absence de toute intrigue, le livre en devient une mielleuse peinture du monde de l'aristocratie anglaise, peu inspirée et peu documentée. On s'y ennuie à mourir, quand on ne voue pas l'auteur aux gémonies pour ce désastre littéraire. Beurk !

Le jeu de l'assassin,d'Amy Raby

Il y a des livres qu'on achète tout de suite quand on les découvre. Pas pour les lire tout de suite, non ! On les garde précieusement, comme un bon vin, en faisant monter le désir petit à petit. 
Ensuite, quand on a vraiment besoin d'un remontant à réveiller les morts, qu'on a lu des romans médiocres et qu'on a presque perdu la foi en la littérature, on les ressort, la main tremblante, l'oeil brillant de fièvre. Et chaque page est un filet de divin nectar, une part d'ambroisie qui s'insinue dans tout notre corps, faisant exploser notre imaginaire. 
Une fois le chef-d'oeuvre fini, il ne reste plus qu'à se coucher, repu, comme un gros chat ronronnant, confiant en l'idée que la vie est merveilleuse et les éditeurs aussi.
Voilà en gros l'effet du "jeu de l'assassin", qui renouvelle agréablement le genre de la fantasy "à capuche". Amy Raby joue admirablement bien avec les classiques du genre : un assassin de première classe, une cible injustement visée, un dilemme moral, des rebondissements et des traîtrises à couper le souffle. 
Mais elle apporte un savoir-faire indéniable, notamment pour mélanger les genres. On passe du roman d'aventure à la romance musclée, de splendides pages dignes de Jane Austen à des scènes de stratégie militaire passionnantes, le tout avec un art de la nuance et de la transition qui feront pâlir les grands maîtres.
Pas de doute, Bragelonne a déniché la nouvelle perle, qui ravira les amateurs du genre. Cette série a clairement sa place aux côtés de Kushiel, de l'Epée de vérité ou de la Voie des Ombres.

dimanche 5 octobre 2014

Morwenna, de Jo Walton

Il y a des gens qui ne reculent devant rien pour vous forcer à ouvrir votre champ de lecture à des chefs-d'oeuvre qui vont  ont échappé. Ils font le forcing, vous en parlent à tout moment,  vous agitent le dit livre sous le nez, ... Ils sont même, selon la rumeur, à deux doigts de débarquer chez vous, en pleine nuit, pour placarder des affiches du livre partout sur votre pelouse. 
Mon excellentissime ami Yvan est de ceux-là. Pas question pour lui de laisser dans le pétrin ceux qui font preuve d'une inexcusable pauvreté culturelle, comme ce fût mon cas avant de lire Morwenna. A sa suite, je fais passer le message.


Pour le dire de manière brutale, ce livre est un mariage étrange entre une liste de lecture SFFF et un journal de bord d'étude des fées. Il est d'autant plus séduisant à mes yeux qu'il s'adresse à un lectorat proche de son personnage principal: plus à l'aise dans les livres qu'avec les gens, constatant avec désarroi qu'il semble d'un espèce différente des gens qu'il côtoie, capable de citer un passage d'un livre lu il y a des années et d'en débattre, les larmes aux yeux, jusqu'à ce que son interlocuteur reconnaisse que l'auteur dudit fut divinement inspiré (ou bien qu'il parte, mort de peur). 
Morwenna est un hymne d'amour à l'imagination humaine, au "bizarre" qui colore le quotidien de certains d'entre nous. Il se démarque des romans habituels en de nombreux points. Premièrement, un langage parfois ésotérique (le jardon des amateurs de SFFF), jamais expliqué, toujours lancé à la face du lecteur comme un camion dans le brouillard. Ensuite, une intrigue à moitié évoquée, parcellaire et brillamment bancale (oui, je n'aurais jamais cru féliciter un auteur pour sa structure volontairement défaillante). Enfin, des dizaines de déclarations d'amour à des auteurs parfois oubliés, souvent peu connus chez nous, mais qui chez moi évoquent des nuits passées à me délecter, en VO, de travaux de grands maîtres de la plume.
Un livre atypique, donc, dont les défauts font toute la grandeur. S'adressant volontairement à un public limité, il ouvrira pourtant l'horizon imaginaire de ceux qui osent s'y aventurer. En ressortant de ce livre, on n'a qu'une envie : fouiller bibliothèques et bouquineries pour découvrir les pépites merveilleuses que Morwenna nous a fait miroiter...

Tigane, de Guy Gavriel Kay

L'auteur a commencé son parcours professionnel en touchant du doigt le Graal : il a aidé le fils de J.R.R. Tolkien a éditer le Silmarillion.  Cette influence "divine" se fait sentir dans la "tapisserie de Fionavar", fort apprécié mais selon moi très surévalué. Tigane sortit quelques années plus tard, une fois que Kay eut acquis un peu de bagage, de réflexion et d'indépendance. Et on peut dire qu'il a vieilli comme le bon vin : en gagnant saveur, bouquet et fragrance. Tigane est comme le pendant mythologique des guerres ayant ensanglanté l'Italie pendant la fin du Moyen Age et la Renaissance. Ajoutez à ce cadre historique chargé d'épopées une pincée de magie, une sensibilité à fleur de peau et une thématique du sacrifice bouleversante et vous obtenez ce chef-d'oeuvre, rien de moins.
Fantasy historique par excellence, Tigane charmera aussi ceux qui aiment les tragédies, les chants de liberté et la triste ironie des destinées gâchées. Prenant, le rythme du récit empêchera tout arrêt accessoire dans la lecture (repas, sommeil, travail, enfants qui pleurent,...), pour mieux vous garder dans cette étrange contrée qui, un jour, perdit son nom et son honneur...

Aila et la magie des fées, de Catherine Boullery

Babelio nous permet, par l'intermédiaire de ses "masse critique", de découvrir autre chose que ce que nos habitudes de lecture sélectionnent naturellement.
Bien souvent, on se retrouve face à de petites perles, dont nous n'aurions pas soupçonné l'existence et qui entrouvrent pour nous la porte d'autres domaines de littérature. Un exercice d'ouverture d'esprit qui débouche sur des plaisirs inattendus.

 Et puis parfois, on tombe sur un livre si mauvais qu'il vous dégoûte de lire pendant des jours... Ce fut le cas avec "Aila et la magie des fées". C'est un véritable catalogue de maladresses et de bourdes d'écriture, un exemple criant d'ouvrage où aucune relecture sérieuse, aucun bêta-lecteur honnête, aucun éditeur professionnel (même bourré), n'a jeté un œil. Les personnages sont d'un ennui mortel, l'univers incohérent et ridicule, l'intrigue plate et convenue...
Pour être honnête, je n'ai pu dépasser les 150 premières pages. Peut-être que l(histoire se métamorphose ensuite, pour devenir un magnifique roman, mais j'en doute... Trop de défauts, absolument rien pour les racheter, ce texte est typiquement un travail bâclé, amateur au pire sens du terme, où rien n'a été révisé ni remis en question.
Le seul intérêt de l'ouvrage ? Cela pourrait servir d'étude de cas pour les écrivains en apprentissage. Chaque passage, chaque chapitre peut être étudié pour voir l'endroit précis où le lecteur ne peut plus continuer tant ses yeux saignent. Un peu à la manière dont on scrute les résultats d'un échec magistral en pâtisserie pour savoir où cela a foiré...
Une petite note pour l'auteur et ceux qui ont les mêmes problèmes : ne renoncez pas à écrire ! C'est un loisir agréable et qui prend aux tripes, on aurait tort de s'en priver. Mais de là à chercher à le publier pour l'infliger au public, il y a un pas à ne pas franchir. Ou alors, on s'entoure de gens sérieux d'abord (bêta-lecteurs, éditeur, critiques honnêtes,...).

Merci quand même à Babelio, j'espère que la prochaine cuvée sera d'un autre tonneau...


samedi 16 août 2014

Forteresse Draconis, de Michael Stackpole


Parfois, on a juste envie d'une bonne série de fantasy, qui nous berce avec tous les motifs du genre sans trop pousser dans l'originalité ou la réflexion philosophique. On a juste envie d'action, de batailles, d'actes héroïques, de stratagèmes astucieux, d'un rythme étourdissant et d'une bonne brochette de personnages pour vibrer.
Pas de grandes prises de risques de l'auteur, pas d'univers incroyables d'où l'on ressort soufflé. L'auteur suit les grandes lignes de la fantasy, assidûment et avec un bon sens de l'humour. Qu'en dire ? Un bon moment, une série sans prétention mais qui nous plonge avec plaisir parmi les dragons, les magiciens et les maîtres-voleurs.

Les héros, de Joe Abercrombie

Voilà une bonne claque comme un aime en recevoir (oui, enfin, vous me comprenez, non ? Bon...). L'auteur m'était déjà connu, mais la Première Loi m'avait laissé un goût d'inachevé. L'art du personnage inoubliable était maîtrisé, mais il manquait une scène à la hauteur. Car Joe Abercrombie n'écrit pas de la fantasy traditionnelle, il l'écrit plutôt comme du théâtre. Ses personnages servent à éclairer les grandes questions humaines : la vie, la mort, l(honneur, le courage, le respect,... Et ici, il n'y a qu'une seule héroïne, malgré le titre : la mort. Le livre est le lieu d'innombrables boucheries, entrecoupées de trahisons et de longues veilles angoissantes. Pas de violence gratuite pour autant, chaque cri de douleur est un trait de pinceau qu'utilise l'auteur pour peindre cette fresque, aussi effrayante que philosophique. Un coup de maître !

mercredi 30 juillet 2014

Victoria, l’apogée de l’Angleterre de Guy Gauthier

Petite découverte grâce à une masse critique de Babelio, cet ouvrage de vulgarisation historique est une plongée dans la vie de la plus célèbre des reines, celle qu'on appelait "la grand-mère de l'Europe". Le sujet du livre est clairement fascinant, avec une bonne alternance entre la vie privée et la vie publique de la reine. Les recherches historiques sont solides et prudentes, même si l'ouvrage, de par sa volonté de vulgarisation, esquive et évite les notes de bas de pages et autres références à d'obscures sources. 
L'auteur adopte un ton sobre mais incisif, n'épargnant personne mais mettant également en valeur des personnages habituellement décriés (notamment le propre fils aîné de la reine, Bertie). Je craignais une vue trop franco-centrée, défaut habituel des historiens français, mais l'auteur a évité l'écueil. Seul défaut, mais dont la responsabilité revient à l'éditeur,, le nombre impressionnant et affligeant de coquilles (en moyenne une toutes les deux pages). Cela devient agaçant, même si le niveau du livre aide à tenir le coup.
En résumé, un très bon ouvrage, qui a le mérite de faire voir autrement l'histoire de l'Empire Britannique à l'époque de sa grandeur.

vendredi 25 juillet 2014

Mauvais augures, de Kelley Armstrong

Le problème, quand on est un auteur à succès, c'est qu'on vous place dans une catégorie et que quand vous essayez quelque chose de différent, même un peu, le public et les éditeurs ne suivent pas toujours, ce qui peut être décourageant. 
Kelley Armstrong ne s'est pas laissée faire et voilà le résultat : à la hauteur des espérances, excellent et même meilleur que ses écrits précédents. L'une des reines de la bit-lit, que ce soit adulte ou ado, se lance dans le thriller. Pari réussi, même si elle ne se transforme pas pour autant totalement. elle avait toujours apprécié le suspense, les mystères qui ne dépendent pas que d'un élément fantastique. Ses histoires ont toujours été profondément ancrées dans la réalité même si elles avaient la tête dans les nuages. On ne peut donc parler de changement, mais plutôt de basculement, d'un rééquilibrage subtil des thèmes et des genres maniés.
On garde donc un élément fantastique, mais en mode mineur et qui n'est pas le moteur du récit. On met beaucoup plus d'emphase sur l'enquête, le mystère et les relations sociales (et l'auteur était déjà très forte là-dedans). 
Kelley Armstrong avait, selon moi, quelques défauts dans ses séries précédentes : soit on tournait un peu en rond avant que l'histoire avance d'un coup (Pouvoirs obscurs), soit on avait un peu de mal à défricher, les récits étant très touffus (l'Autremonde). Je suis donc heureux de voir qu'elle a affiné sa plume pour s'accorder à mes goûts (quel service !). Un récit plus fluide, très humain, avec la dose d'exposition qu'il faut, sans lourdeurs. Que demander de plus ? La suite, bien sûr, qui sort en août en VO et on espère très bientôt en VF. 
Pour les amateurs de bit-lit et de fantastique, c'est l'occasion de découvrir une auteur chevronnée s'essayant à un genre voisin.
Pour les amateurs de thriller, c'est l'occasion de découvrir une auteur de très haut niveau, dont vous n'aviez pas entendu parler, mais qui apporte sa pierre au genre, de façon très rafraîchissante et en maîtrisant les thèmes du milieu.

mardi 22 juillet 2014

Il faut sauver Zoé, d'Alyson Noël

On connaît plus l'auteur pour ses séries fantastiques, mais Alyson Noël s'est aussi essayée, en son temps, à la littérature "pour filles " (expression stupide et erronée mais on fera avec, même si je préférerait "young chick-lit"). Et on peut affirmer qu'elle fait mieux que se défendre. Ses personnages sont attachants sans être mielleux, son intrigue comporte suffisamment de gravité pour faire apprécier les moments plus légers, le ton est juste pour un public et une narratrice adolescents. L'intrigue manque un peu de drame et de suspense, mais l'auteur respecte assez bien les conventions du genre pour que cela ne soit pas un gros défaut.
Une bonne histoire, donc, qui permettra de faire réfléchir sans  tomber dans le moralisme, tout en présentant une galerie de personnages assez intéressante. A conseiller, donc, de même que les autres séries de l'auteur.
Merci à l'éditeur Michel Lafon de me l'avoir fait découvrir.

vendredi 11 juillet 2014

Blood song, d'Anthony Ryan

En Fantasy, mon domaine de prédilection, je suis toujours méfiant quand un éditeur me vend un coup de cœur. Bien souvent, il s'agit d'un coup de pub immérité, parce qu'un film ou une série va sortir ou que l'auteur est inhabituel (très jeune, aveugle, un animal de compagnie,de l'école française, à l'humour carambar,...). Evidemment, ce n'est pas le cas quand c'est Bragelonne qui propose : en six ou sept ans, je ne me souviens m'être trouvé déçu qu'une seule fois.
Une fois de plus, Brag' assure et nous fait toucher le jackpot : une série de Fantasy rythmée, accessible et brillamment écrite. Pour un premier roman, on ne peut qu'être charmé (le dernier coup de cœur était Antoine Rouaud, bref le niveau reste excellent).
L'auteur utilise avec un soin extrême les classiques du genre, revisitant les éléments habituels de l'école militaire, de la religion militante, des guerriers pris de doute, une romance impossible, des faits d'armes héroïques et désespérés,  des intrigues politiques,...
L'auteur maîtrise son sujet et amène subtilement les éléments nécessaires pour faire du héros un personnage multidimensionnel, attachant, mais en même temps contrasté. On tracera facilement des parallèles avec le Nom du Vent, L'épée de vérité et le soldat chamane. Bref, un excellent choix, qui vous consolera du temps maussade...

mardi 1 juillet 2014

le dernier apprenti sorcier,de Ben Aaronovitch

Si vous aimez Londres et la sorcellerie moderne sur un mode ésotérique et ampoulé mixés avec la police métropolitaine et des créatures fantastiques hautes en couleurs et sacrément caractérielles, cette série est pour vous. Quand un jeune policier d'origine africaine est engagé comme enquêteur dans la section ésotérique de la police de Londres, il nous entraîne dans un étrange voyage entre sorciers sadiques, esprits des eaux susceptibles, sociétés secrètes et plats indigestes. Bourrée d'humour cynique et de drames douloureux, cette série éminemment originale vous promènera dans les quartiers de Londres à toute allure, dans des air envoûtants de jazz, des remugles de bière vite bue et avec le crachotement du talkie-walkie de service en bruit de fond.
Quatre tomes déjà parus, et trop vite lus...

lundi 23 juin 2014

Trylle, t.1 : Échangée d'Amanda Hocking

Sympathique petite série fantastique, la saga Trylle repose sur le mythe du changelin, cet enfant que les fées placent en échange d'un petit humain enlevé par elles. Transposé dans l'univers contemporain, l'auteur joue sur les thèmes efficaces de l'identité, de la famille (biologique ou non), de la place dans la société, du jugement des autres, du choix de son futur,...
Pas de grande soupe à la thématique adolescente pour autant, le récit est bien construit, visant bien son public young adult,avec ce qu'il faut de romance et d'action pour accrocher aux personnages, particulièrement bien ambivalents. Seul bémol, l'utilisation du mot "troll", qui tombe comme un cheveu dans la soupe. pour le reste, on est dans de la bit-lit pour adolescents classique mais bien réalisée, accrocheuse et rafraîchissante.
Vous l'aurez compris,on n'a pas déniché ici la perle qui éclipsera le reste du catalogue de l'éditeur, mais plutôt une histoire sympathique, au bon potentiel, comme on aimerait en lire tous les jours pour être de bonne humeur et la tête pleine d'images d'ailleurs.

Beauté de Sarah Pinborough

Dernier épisode de la trilogie parue chez Milady, Beauté reste dans la lignée des deux précédents,mais avec quelques réserves. Tout d'abord, rendons les honneurs au format : un petit livre très joli, rendant hommage au talents des maquettistes de chez Milady (l'édition originale est nettement plus terne). Au prix où sont les livres, il est à apprécier que l'emballage soit aussi beau à contempler que le contenu à lire? Cela peut sembler superficiel, mais pour moi c'est un atout et une première invitation réussie.
Pour le contenu, je ne vais pas bouder mon plaisir : on retrouve l'entrelacs ironique de contes de fées télescopés et perversement remaniés. Néanmoins,  je le trouve un peu moins réussi que Charme, peut-être parce que l'auteur a du nouer les fils tressés précédemment et que le résultat est parfois artificiel... Cela reste cependant un excellent livre, la conclusion d'une trilogie que l'on offrirait bien en cadeau à tout-va, avant de la relire le soir en cachette. 
Quoi qu'il en soit, il est urgent de découvrir le reste de l'oeuvre de Pinborough, non ?

mardi 17 juin 2014

Charme de Sarah Pinborough

Le premier tome de la série, Poison, m'avait déjà impressionné par sa simplicité et sa décadence en filigrane, mais l'auteur force admirablement le trait avec la suite, Charme. Relecture du conte de Cendrillon avec une héroïne bien moins victimisée (et ses belles-sœurs moins diabolisées), le récit garde son dépouillement et sa ligne perverse. L'auteur prend bien garde de reprendre les éléments qui ont rendu le conte populaire (le rat, la pantoufle de verre, la marraine,...) et les teintant d'une dose d'humanité (et pas forcément les aspects les plus reluisants). Elle lie astucieusement le second tome au premier et enrichit ainsi sa galerie de personnages. Une belle réussite de concision et de tension sensuelle, à réserver aux lecteurs avertis. Qui aurait cru que Cendrillon serait à ce point coquine ?

dimanche 15 juin 2014

Les stagiaires de Samantha Bailly

Dernière lecture de Samantha Bailly (pour l'instant), avec les stagiaires, un roman mi-romance mi-roman de société, où l'on suit un groupe de stagiaires en entreprise et leurs émois sentimentaux. 
La couverture ne m'inspire que peu et donne une image des protagonistes qui me semble à l'opposé de celle donnée dans l'histoire. Dommage, je pense qu'une couverture plus classique (comme celle des milady romance) aurait bien mieux convenu...
Techniquement, l'auteur est au sommet de son art : des épisodes bien équilibrés, des arcs de développement intérieur et extérieur bien ficelés, un rythme soutenu et varié,... Cependant, j'ai un goût de trop peu dans la bouche, comme s'il y avait une certaine retenue dans le donné de l'auteur, comme si elle n'avait pas sorti ses tripes dans son premier jet. 
Peut-être aussi la faute à une trop grande ressemble à "ce qui nous lie", qui est nettement meilleur. C'est comme si on avait pris le même canevas, enlevé l'élément fantastique et comblé avec des intrigues secondaires bien construites. 
Il ne faut cependant pas se leurrer : ce livre reste un trop bon livre, mais il lui manque comme une âme pour habiter ce corps parfait que l'auteur a façonné. Quand on s'est habitué au caviar, difficile de revenir à quelque chose de plus classique, même si la qualité est là. Mais vu l'immense talent de l'auteur, on attendra le prochain ! 

Ce qui nous lie, de Samantha Bailly

Tout autre style qu'Oraisons, et une superbe histoire qui démontre que l'auteur a plus d'une corde a son arc (pour elle,on pourrait parler d'une mitrailleuse) et est autant à l'aise dans la romance paranormale que la fantasy.
On intègre ici une petite étude d'un thème accrocheur : si vous aviez un pouvoir étrange, qu'en feriez-vous ? L'héroïne s'en sert dans une optique de justice glaciale et impitoyable, se transformant lentement en une machine dénuée de sentiments. Perdra-t-elle toute humanité, emprisonnée dans sa vertu radicale ?
L'auteur a particulièrement bien travaillé sa technique : on suit ici parfaitement l'arc de développement de l'héroïne, avec un travail moral subtil et nuancé. Le décor est aussi particulièrement bien rendu, avec suffisamment pour ancrer l'intrigue sans noyer le lecteur dans une étude de milieu.
Bref, un excellent récit qui peut servir de modèle à tout apprenti-auteur, dans sa technique et dans sa sensibilité. Pour les lecteurs, on conseillera de se libérer quelques heures, car il sera bien difficile de le reposer une fois ouvert.

samedi 14 juin 2014

Oraisons (intégrale) de Samantha Bailly

Petite rétrospective de Samantha Bailly, cette prolifique jeune auteure française, qui n'en finit plus de nous pondre des chefs-d'oeuvre à tour de bras. 
Commençons par Oraisons, dans sa version intégrale publiée par Bragelonne. On sent tout de suite que l'ouvrage a été publié ailleurs et que la qualité du travail éditorial s'en ressent. Pourtant, la qualité de l'ouvrage est plus que potable, ce qu'il laisse penser que les collaborations futures avec cet extraordinaire éditeur cracheront feu et flammes dans le ciel de la littérature francophone.  
Bailly manie harmonieusement la romance et la fantasy classique, passant avec un bon sens du rythme de phases d'action haletantes à des moments posés, permettant plus de réflexion. L'originalité de l'univers est rafraîchissante,même si on peut regretter pas mal de scories et de dissonances, qui auraient pu être éliminées par un bon éditeur derrière. 
Oraisons n'est donc pas parfait, mais reste néanmoins un excellent roman dont le potentiel narratif est bien réalisé. On en vient à espérer un second roman  dans l'univers, qui laissera un excellent souvenir.

Les papillons rêvent-ils d'éternité ? de Sandra Labastie

Merci aux éditions Lafon de nous faire découvrir un récit poignant qui ne tombe par pour autant dans des longueurs pseudo-journalistiques ou du pathos pleurnichard. Personnellement, cette lecture réveille en moi différents "lecteurs" : le théologien amateur, le lecteur passionné et le croyant questif.
L'oeuvre nous fait pénétrer à l'intérieur d'un mouvement fondamentaliste qui n'a  de chrétien que le nom, mais le récit tourne autour de l'intériorité d'une jeune adolescente. Pas de démontage du système oppressif de la secte, mais un questionnement et de petites expériences de vie d'un prisonnier de ce système.
L'attrait du livre est précisément qu'il évite les embûches classiques de ce genre d'ouvrage engagé : on ne dénonce pas sans fin les travers des religions, on ne part pas dans de grandes digressions psycho-philosophiques, on ne se vautre pas dans le morbide et le malsain.
Non, l'auteur a privilégié une voix légère, un récit concret et une absence de parti pris. Pas de jugement manichéen mais une invitation à avoir de l'empathie pour des êtres humains qui se cherchent et parfois s'égarent.
Un roman tout en finesse et en poésie, subtil et touchant. Une belle découverte...

lundi 9 juin 2014

LE GARDE, LE POÈTE ET LE PRISONNIER de LEE JUNG-MYUNG

N'étant pas un fanatique de la littérature asiatique, j'étais un peu sceptique sur ma capacité à critiquer cet ouvrage. De plus, autant j'aime la poésie, autant j'en suis un profane irréductible et j'ai  un mal fou à en lire... 
Visiblement, le génie dépasse à la fois les frontières culturelles et les imitations de votre humble serviteur, car je ne peux que me retrouver admiratif et ébloui par un tel chef-d'oeuvre.
Ce livre fouille au plus profond de l'âme humaine, dans celle qu'elle a de plus souffrante et admirable. C'est de la vie dont on parle, celle qu'on arrache aux griffes de la mort à chaque souffle, qu'on espère malgré les privations et la peine, qu'on excave dans les tréfonds du chagrin. En le lisant, j'ai été assailli par les fantômes du docteur Mengele, de Rudolf Hoess et de tant d'autres bourreaux sanguinaires qui ont vainement tenté d'effacer l'espoir dans le coeur de mourants. On est ici à mi-chemin entre l'archipel du  goulag et le cercle des poètes disparus, entre une contemplation de l'horreur humaine et l'espérance jamais éteinte d'un souffle de vie.  
Bouleversant, glaçant, ce livre me laisse encore tout tremblant. Il ne laissera en paix aucun lecteur, tant il touche aux lignes de failles de l'humanité, mais aussi à la charité, faible étincelle tapie au fond de chacun  de nous. Magnifique et dérangeant...
Merci à l'éditeur de m'avoir fait découvrir une telle perle !

The Anatomy of Story: 22 Steps to Becoming a Master Storyteller de John Truby

Souvent présenté comme l'anti "writer's journey" qui encourageait la construction d'un récit selon un cadre prédeterminé d'étapes que l'on retrouve dans des récits mythologiques, le livre de John Truby se veut l'apologie d'une créativité plus morale et plus libérée.
A mon sens, le pari n'est pas parfaitement réussi. Il libère la constructiion d'intrigues des carcans des schémas traditionnels (étapes du voyage du héros, etc...) mais les remplace par d'autres qui ne sont guère plus souples. Ses arguments pour défendre son modèle ne sont pas inintéressants : son schéma est plus organique, le développement moral du héros privilégié par rapport aux événements (qui en découleront naturellement) et ses réflexions sur le concept de "révélations" sont très prometteuses.
Cependant, son système, qui se rapproche d'une grille de bingo évolutive si on l'applique à la lettre, découragera tout auteur qui n'aime pas structurer à l'avance. Ceux qui aiment tout établir avant d'écrire y trouveront leur bonheur, les autres auront devant eux, s'ils poussent jusqu'au bout l'exercice, une structure originale mais l'envie de l'écrire sera partie. 
Reste donc l'alternative de prendre l'ouvrage comme un ensemble de petits "trucs", de petites pensées incisives et pertinentes sur la logique d'un récit dramatique. En cas de blocage lors d'un premier jet, on jettera un oeil à la théorie pour avoir un coup de gouvernail, mais sans plus.
Cependant, l'ouvrage peut avoir tout son sens dans le cadre d'une réécriture ou en cas de sauvetage d'un jet boiteux. Cela demande un certain courage et une bonne dose d'obstination, mais on peut imaginer sauver ainsi une histoire condamnée en un récit tout à fait potable. 
Cet ouvrage est donc, à mon sens, une boîte à outils plutôt qu'un nécessaire de préparatifs pré-écriture. A consulter car il a une valeur incontestable, mais n'en faites pas votre Bible.

dimanche 8 juin 2014

No plot ? No problem ! De Chris Baty

Chris Baty est le fondateur du célébrissime NanoWriMo, cet exercice d'écriture collectif, qui essaie d'encourager un maximum de gens à écrire une nouvelle de 50.000 mots en un mois de temps. 
Ce livre est à la fois un retour critique sur l'expérience (et notamment la qualité des œuvres produites), mais aussi un guide pour réussir au mieux l'expérience d'une écriture sans stress et sans contrainte (hormis celle de temps qui devient alors un moteur.
L'auteur, contrairement à beaucoup, ne nous promet pas la création d'un chef-d'oeuvre immortel, mais nous encourage à terminer un premier jet, horizon lointain et bien trop souvent inaccessible. une multitude de petits conseils pour faire face au découragement ou à la pression des autres parsème l'ouvrage. 
La révision du premier jet n'entre pas dans le cadre de l'ouvrage, un inconvénient car il s'agit de l'étape qui transforme une oeuvre balbutiante en un texte fini, mais aussi un avantage car l'auteur, honnête, place ses limites et se concentre sur ce que son projet veut amener à faire. 
Pas de grande théorie analytique ici, mais un bon coup de boost pour rédiger ce premier jet tant convoité. Plus d'excuses valables pour ne pas se lancer ! 

La station Araminta de Jack Vance

Petit chef-d'oeuvre du maître qui exploite les différents goûts de Jack Vance : l'exotisme, les romances contrariées, les personnages haineusement bêtes et méchants et, cachée sous tout cela, la question lancinante du bien et du mal dans la société humaine.
Ne vous laissez pas leurrer par l'aspect comique et superficiel des aventures de Glawen Clattuc, chaque épisode met en avant de grandes questions qui, posées par une multitude de miroirs déformants, déroutent sur l'unicité de la nature humaine et du bon sens.
Les écrits de Jack Vance, à la fois intemporels et affreusement typés, font l'effet d'une douche nostalgique, fraîche et mélancolique. Histoire bien contée, délire permanent de l'auteur pour les détails allégoriques, images choisies et "méchants" de service bien souvent vainqueurs et puis punis, le cycle de Cadwal m'a laissé, quinze ans après une première lecture, une même impression de voyage impossible mais pourtant réalisé.

mercredi 28 mai 2014

L'immeuble des femmes qui ont renoncé aux hommes, de Karine Lambert

Succession de petites histoires tristes reliées par un même principe, la trahison amoureuse, ce livre me semblait dans son synopsis assez intéressant. Une thématique universelle, couplée à un aspect géographique (toutes ces femmes habitent un immeuble interdit aux hommes), promettait de subtiles dérives et d'épiques moments de tension. Il n'en fut rien. 
Ce qui me dérange le plus, c'est qu'il n'y a pas d'histoire. On a bien parfois un petit bout d'intrigue, mais qui ne dure pas plus de deux pages, avant de retomber comme  un soufflé mal cuit. Pas de tension qui pousserait à lire, pas de personnages suffisamment accrocheur pour maintenir l'intérêt, pas de petites gemmes qui donneraient envie de réfléchir ou de rêver plus loin.
Une coquille vide, un exercice de style qui ne mène à rien. Peut-être peut-on en retirer un certain plaisir de lecture si on n'aime ni les histoires prenantes ni les personnages pluridimensionnels, mais ce n'est pas mon cas. Un livre doit me faire entrer dans une réalité, me laisser pénétrer dans la peau et le coeur d'un autre, me faire sortir de moi-même et me perdre dans un ailleurs inconnu. Rien de tout cela ici, je passe mon chemin. En réfléchissant à ce qui fait que d'autres ont aimé, mais sans en trouver la clé.
Merci cependant à l'éditeur Michel Lafon de m'avoir permis de le découvrir. Maintenant, j'ai matière à réflexion : qu'a-t-on bien pu trouver à ce texte  pour le publier alors qu'il a bien trop peu de tout à mes yeux ?

mercredi 21 mai 2014

Lettres écarlates d'Anne Bishop

L'éditeur (que j'affectionne au plus haut point) nous vend cet opus comme "un des meilleurs romans" du genre. Ce type d'affirmations me paraît rarement justifié, mais une fois de plus Bragelonne a eu le nez fin. Auant vous dire que je vais me jeter sur le second tome de la série (en anglais, je n'aurai pas la patience qu'il sorte en français).
Besoin d'en savoir plus pour être convaincus ?
Bon, commençons par dire que je n'ai pas du tout accroché à la série précédente de l'auteur. Brouillonne, à la limite de l'absurde, elle avait pour moi l'intérêt d'un rat mort pour un fin gourmet. Mais ici, j'ai trouvé plus que du tolérable... Univers dystopique (ou utopique, c'est cela) original et recherché, petite romance révélée en toute subtilité, personnages accrocheurs dès les premiers mots, rythme posé et finement stressant,...
Anne Bishop est l'une des rares auteurs (avec Modesitt) à avoir excellé dans un exercice hautement périlleux : décrire un métier ou une occupation a priori ennuyeuse (ici agent postière) et en avoir fait le moteur de son récit.
Bref, un tout gros coup de coeur, sans doute la révélation bit-lit de l'année pour moi !

jeudi 8 mai 2014

Les cavaliers de l'apocalypse t.I par Larissa Ione

Chose étrange, je n'avais pas reconnu l'auteur comme ayant aussi écrit une série, Demonica, que j'avais beaucoup apprécié il y a deux ans. Comme quoi... Même si l'univers est le même et que certains personnages se croisent, les deux séries peuvent se lire indépendamment et cela ne gâche rien de n'avoir pas lu la première. Soyons clairs, nous tombons ici dans de la bit-lit très érotique, ce qui rebutera les plus puristes du genre fantastique plus large. Mais ne boudons pas notre plaisir, car outre de l'action sous les couvertures, on n'a guère le temps de s'ennuyer. Un rythme plus que soutenu, des personnages aussi hauts en couleurs qu'attirants, une guerre entre l'enfer et les cieux, quatre personnages maudits dont le côté sombre fait frémir, mais aussi une bonne dose d'humour, une recette qui promettait déjà en résumé mais qui donne toute sa puissance sur papier. Et vive les chiens de l'Enfer !

lundi 5 mai 2014

Les chroniques de Liève, t.I, de Tom Elensis

Une des premières publications du petit éditeur Kitsunegari, cette histoire se révèle être une assez bonne surprise. J'avais un peu peur du côté "micro-édition", qui,  bien souvent, s'assimile à "impression sauvage", mais, tant du côté de l'auteur que de l'éditeur, on sent une volonté de bien faire et de pousser plus loin que l'essai vite fignolé.
Alors, évidemment, on n'a pas ici affaire au roman du siècle et il reste un gros travail à faire en termes de structurations, que ce soit des informations sur le monde, sur les personnages ou sur l'intrigue, mais on ne peut s'empêcher de trouver bien tournés les différents personnages et les retournements assez cohérents et productifs en terme de tension.
Petit bémol, la fin,qui annonce le tome 2, me semble amener trop de changements et j'ai peur que le style "fantastique noir" du premier ne soit trop différent du second et fasse perdre au lecteur l'impression d'une continuité. Mais n'est-ce pas la preuve que le premier tome a fonctionné ?
Dommage aussi pour la couverture, qui n'est guère attirante... Et moi, la couverture, j'y attache de l'importance. Elle ne doit pas refléter absolument l'histoire, mais j'aime assez qu'elle offre un plaisir esthétique ou  une évocation intrigante, ce qui n'est pas le cas ici. Néanmoins, je conclurai par : un éditeur à qui donner sa chance (merci à lui de m'avoir envoyé son ouvrage) !

mardi 22 avril 2014

En sommeil ? Que nenni !

Ces derniers temps, j'ai un peu moins posté de critiques. La faute à mes autres activités : bêta-lecture et critique de manuscrits. Et aussi la lecture d'un gros Brandon Sanderson de près de 1.000 pages. Mais j'ai encore quelques chroniques de dernières les fagots à faire découvrir. Lisez-les sur mon compte Babelio !

mardi 15 avril 2014

Le dernier royaume (t.2) de Morgan Rhodes

Pour ce second tome de la série,l'auteur garde les mêmes mécanismes et on peut dire que c'est porteur. Relations croisées et intenses entre les différents héros, personnages iconiques représentant chacun une facette de l'univers, personnages torturés mais actifs,la recette est toujours bonne et n'a pas un goût de réchauffé.
Seul bémol à mes yeux, les coups de foudre parfois à répétition. Ils ne sont pas toujours très subtils, mais c'est leur nombre qui me dérange, surtout. D'un autre côté, c'est l'un des thèmes du livre, donc la critique est assez subjective et sans doute mal fondée sur ce point.
L'ensemble ne s'essouffle pas après le premier tome, comme cela arrive souvent. On sent un travail technique plus poussé sur ce tome, visant à resserrer les passages plus lents et à relier les différents personnages. Autant dire que cela augure de bonnes choses pour la suite...

lundi 14 avril 2014

Le dernier royaume (tome 1), de Morgan Rhodes

L'un des côtés les plus appréciés des lecteurs de Fantasy est la capacité qu'a l'auteur de construire un univers cohérent, riche et attirant. Ici, on pourrait parler d'échec, car ce que nous propose Morgan Rhodes ne correspond pas aux impératifs du genre, même si on est clairement dans une tranche de lecture "jeunes".
L'univers se réduit à quelques concepts : pauvreté/richesse, décadence/intransigeance, urbanité/rusticisme,... On ne découvre le monde que par quelques vignettes, comme de courtes plongées, qui peuvent nous laisser sur notre faim.
J'ai dit "on pourrait parler d'échec". Je me permets ici une courte comparaison sur le sujet du monde détaillé pour vous faire comprendre mon ambivalence : dans les œuvres de Shakespeare, l'action se concentre toujours sur quelques personnages iconiques, qui font  office à eux-mêmes de décor, et le reste des localisations ou savoirs objectifs sur le monde n'a que peu de relief ou d'importance. Est-ce que cela fait des pièces de ce vieux Will un travail inachevé, bâclé ? Non.  Il s'agit de choisir un mode de narration et de s'y tenir.
L'énergie que Morgan Rhodes n'a pas dépensé dans l'univers, elle l'utilise dans ses relations entre personnages. Non pas pour en faire de mini-romans biographiques sur pied. Non, on reste dans l'économie et l'efficacité. Un rythme soutenu, des dilemmes cruels, des fins tragiques, la mécanique est, bien que parfois ténue, bien huilée.
On ne tient pas là le roman de la décennie, mais on ne peut s'empêcher d'en tourner les pages, pour savoir si les héros, qui sont en eux-mêmes les royaumes, les Puissances, s'en sortiront ou mourront (voire pire). Amours tragiques, fins ignominieuses, intrigues sanglantes, innocents sacrifiés, rien ne sera épargné !
Un grand merci  à l'éditeur en tout cas de me l'avoir fait découvrir !

lundi 7 avril 2014

L'échiquier des dieux, de Richelle Mead

Richelle Mead est une auteur dont la diversité m'impressionne. Sa série la plus connue (un film sortira bientôt) est Vampire Academy, mais elle n'éveille aucun intérêt chez moi. Je suis bien plus séduit par sa série Succubus, avec sa libraire démone en diable, ou encore le Cygne noir et son héroïne tiraillée entre sa nature de chasseuse et un trône féerique qui lui tombe dessus.
Avec l'Echiquier des dieux, Richelle Mead se lance dans l'anticipation, avec un univers très travaillé sur des sociétés futures après une apocalypse pestilentielle. Si elle part sur de classiques bases de sociétés organisées autour d'un concept simple (religion / aristocratie / cosmopolitisme / technologie), on sent qu'elle dépasse le cap traditionnel en les faisant évoluer, se perdre, se retrouver sous des idéaux nouveaux. Pas de manichéisme ni de simplification outrancière, l'auteur a bigrement brossé son univers.
Passons aux personnages. C'est là que Richelle dépasse encore nos attentes en brossant des êtres multidimensionnels, au passé et aux aspirations fouillées. Les interactions sont rythmées, la romance délicate et profonde, l'action présente et servant bien l'intrigue. Un bon travail d'équilibre qui permettra à l'histoire de plaire à différents publics.
Je pourrais m'étendre encore sur le sujet, mais je dénaturerais la fraîcheur du livre. En résumé, voilà un bon page-turner qui marie harmonieusement les genres, mêlant des thèmes intéressants (religion, racisme, liberté,...) sans noyer le lecteur. A lire !

mercredi 2 avril 2014

Poison, de Sarah Pinborough

Il convient de souligner, dès la prise en main, la  beauté de l'objet. Graphismes soignés, reliure envoûtante, voilà un livre comme on aimerait en offrir. A retenir donc.
Pour  le texte, Sarah Pinborough s'embarque dans un genre peu prisé chez nous mais très développé outre-Atlantique, le détournement de contes. En francophonie, il est surtout visité par les moralistes et les humoristes, mais l'auteur prend ici un autre parti, celui de la déconstruction et de l'étude de personnages. Ceux qui s'attendent à un récit touffu, à un univers développé et à une intrigue à tiroirs feront donc mieux  de passer leur chemin (et d'aller visiter la série Princesses mais pas trop, autre excellente série de la maison, aux connotations de féminisme et de fantasy plus classique).
L'auteur s'engage pas à pas dans une série de galeries de portraits, savamment détournés des personnages classiques. Leurs facettes sont assez surprenantes, telles Blanche-Neige en sauvageonne impudique, la Reine en garce frigide mais fragilisée, ou encore le prince en couard machiste.
Une petite lecture très sympathique, avec ce qu'il faut d'humour et d'irrévérence pour passer un excellent moment. A ne pas considérer si vous voulez plonger dans une grande épopée ou une romance torride, cependant. On attend le second avec une grande impatience et un sourire non dissimulé.
Un autre avis ? Suivez ceci.

vendredi 28 mars 2014

Le journal de Mr Darcy, d'Amanda Grange

Après avoir savouré le succulent journal du colonel Brandon, me voilà plongé dans une toute autre personnalité, celle de l'arrogant et hautain Mr Darcy. Bizarrement, cette forme d'impolitesse et d'intolérance semble un argument de charme pour la gent féminine (qui restera toujours pour nous, les hommes, un continent mystérieux). Restait à savoir si ce journal tiendrait ses promesses, à savoir : rester cohérent par rapport à l'oeuvre et au personnage original ; apporter suffisamment d’éléments nouveaux, en terme de style et de sentiment, pour être plus qu'un monotone exercice de relecture.
Encore une fois, Amanda Grange montre sa maîtrise du genre en imprimant à son écriture une sensibilité et un affrontement de valeurs qui dépeignent parfaitement son protagoniste. On sent Darcy déchiré entre son éducation conservatrice et aristocratique et ses sentiments si sauvages qu'ils le laissent gravement troublé. Mais, pour respecter le personnage, cela se fait en finesse, en faisant appel à la raison et aux convenances. 
La notion de famille, avec ce qu'elle peut avoir de dégradant ou d'enrichissant pour un amant, est particulièrement bien développée, donnant une dimension nouvelle aux personnages secondaires. Une lecture qui donc ouvrira d'autres horizons pour ceux qui aiment le travail du style, mais également à ceux qui aiment voir un individu troublé par ses passions.

jeudi 27 mars 2014

Nos étoiles contraires, de John Green

Qu'est-ce qui pourrait bien rassembler un hollandais ventripotent, une accro à l'oxygène et un basketteur unijambiste ? Le cancer apparemment, ce tueur insidieux qui se nourrit de nous-mêmes et qui en définitive n'est que la part sombre de notre destinée. 
Comme la plupart des romans que me conseille mon épouse, celui-ci contient plus qu'une petite part de tristesse et de désespoir, mais il contient cependant une lumière, vacillante mais dont la force brise les plus profondes ténèbres.
"Nos étoiles contraires" n'est pas un "hymne à la vie" débilitant et manichéen, il est un jugement sur les valeurs que nous mettons dans nos émotions, qu'elle soient belles et romantiques, ou sombres et morbides. Sans parti pris, avec un humour grinçant et un doigté léger et honnête, John Green fait valser nos certitudes confortables sur la maladie, le deuil et, en définitive, sur la vie elle-même. On pourrait qualifier ce livre du roman du "malgré tout", un chant du cygne du désespoir, malgré la mort, malgré la perte. Difficile d'en ressortir inchangé... Une belle oeuvre, triste et pleine de confiance...

Le journal du colonel Brandon, d'Amanda Grange

Du colonel Brandon, on connaît tout ou presque.Que ce soit par l'oeuvre originale ou par les multiples adaptations de "raison et sentiment", nous sommes tous tombés sous le charme réservé de cet étrange solitaire, dont le cœur n'est qu'un amas d'écorchures.
Pour les audacieux voulant le dévoiler un peu plus, il n'y a que deux solutions : respecter l'oeuvre-mère et sembler être à court de matériel, ou broder des aventures nouvelles, mai qui risquent de dénaturer le personnage initial.
Amanda Grange a fait le pari difficile de ne rien ajouter au destin de James Brandon mais de modeler son style pour en rendre toute la richesse. Elle s'ingénie par une plume retenue et économe à retranscrire les pensées mûries du colonel et des errements de son âme. Nous sommes ainsi plongés, presque goutte à goutte, dans les tréfonds d'un homme tourmenté, au sort dramatique mais dont peu à peu il triomphe, par sa patience et sa gentillesse. 
Le risque était grand de tomber dans un exercice de style verbeux et monotone, mais l'auteur laisse parler son art en adaptant sa  plume à l'esprit du gentilhomme. Un défi relevé avec subtilité et minutie, une splendeur !

lundi 24 mars 2014

Les chroniques des Crépusculaires, de Mathieu Gaborit

Petite replongée dans les classiques de la Fantasy, ceux qui vous marquent pendant des années et dont un seul passage fait resurgir des images merveilleuses qu'on croyait oubliées.
Commençons avec un maître français, au style très personnel, Mathieu Gaborit. Les chroniques d'Agone, cet étrange jeune homme, duelliste et magicien, torturé et sauveur, marquent pour moi une étape dans mon cheminement à travers l'imaginaire et sa construction. En effet, Gaborit s'affranchit des classiques pour mêler poésie, onirisme et romantisme en une sarabande infernale et un monde si neuf qu'il brûle la rétine. 
Gaborit innove en courtisant le lecteur, que ce soit par son étrange magie,  ses fracas d'intrigues ou ses personnages difformes et séduisants. Il renouvelle tout l'art de la création d'un monde en associant fragilité et puissance, délicatesse et souffrance, torture et délivrance. Un maître, un vrai.

jeudi 20 mars 2014

Rage de dents, de Marika Gallman

Une couverture hideuse peut cacher un roman plus  qu'honnête, c'est la leçon à tirer de ma lecture du jour...
De la bit-lit suisse, voilà qui n'est pas commun. Mais Marika Gallman n'a pas à rougir face à l'armada américaine. elle maîtrise bien les motifs du genre et, si elle ne parvient pas à se débarrasser de tous les clichés, ce n'est pas primordial dans ce style particulier.
On adoptera ou on détestera d'emblée l'héroïne au caractère de cochon sauvage, mais force est de constater qu'elle donne un rythme admirable au roman. On se trouve toujours dans l'instantané, la surprise, l'émotionnel. Cela fatigue parfois mais au fur et à mesure de la lecture, les raisons en deviennent de plus en plus claires et le livre gagne en cohérence. Les personnages secondaires sont bien travaillés, avec des aspects creusés de toutes parts. 
L'auteur maîtrise particulièrement le principe de faire souffrir les personnages auxquels le lecteur s'attache. elle parvient à le faire même avec les seconds couteaux, ce qui n'est pas toujours aisé. 
Ilreste à mon sens des pistes sous-exploitées dans les thèmes de l'ouvrage, qui à mon sens le rendent trop léger, mais je parierai que cela s'arrange dans les tomes suivants... 
Bref, à conseiller ! 

mercredi 19 mars 2014

Les mains de Dieu, de Ludovic Rosmorduc

Afin d'être correct avant de dévoiler mon avis sur ce livre, que les choses soient établies : je n'ai pu continuer après les 200 premières pages. Le début était passablement attirant, mais l'intrigue se dégrade tellement par la suite que je n'avais plus l'envie de m'infliger le reste... Lâcheté ou prise de conscience ?

L'auteur, historien amateur (il en faut, je voudrais pas avoir l'esprit de chapelle pour autant), utilise le merveilleux passé de sa région, mais malheureusement on a plutôt l'impression d'un enfant barbouillant avec des peintures à doigt : les couleurs sont jolies, mais on ne peut qualifier cela de chef-d'oeuvre. Le manque de critique et de discernement dans l'aspect historique de son livre m'ont fortement gêné. Mais le plus dommageable est l'intrigue, faible et téléphonée, à peine digne d'une mauvaise copie d'un Dan Brown, avec des rebondissements flasques, des deus ex machina risibles,...
Les rares éléments un peu plus profonds sont malheureusement sous-exploités, mais prouvent qu'avec de meilleurs conseils et une ouverture à d'autres genres, l'auteur aurait pu accoucher de quelque chose de meilleur qu'un pâle da vinci code carcassonnais.
Me suis-je montré trop dur ? Sans doute... Peut-être le genre historique, qui me passionnait tant adolescent, est-il trop (injustement) vulnérable à ma critique après des années d'étude du domaine... Néanmoins, ce livre n'a fait naître en moi que de l'ennui... Je suppose que d'autres le trouveront passionnant et je leur souhaite une excellente lecture. N'est-ce pas le but recherché ?

mardi 18 mars 2014

L'empreinte du démon, de Patricia Briggs

Pour comprendre les qualités de ce livre, il est nécessaire de faire un brin d'historique. Avant de devenir mondialement célèbre avec sa série Mercy Thompson (dont le premier cycle est pour moi un coup de cœur) et d'être reconnue comme une reine de l'urban fantasy, Patricia Briggs avait déjà écrit de nombreux livres de Fantasy. Parmi eux, son chef-d'oeuvre à mes yeux, Corbeau (qui est le sien aussi, elle me l'a confié), mais aussi son premier livre, Masques, dans l'univers des Sianim.
Soyons clairs, je n'aime pas Masques, ni sa suite. Le roman dont il est ici question se déroule dans le même univers, que je trouve vide et peu original. Vous me direz que je partais déjà perdant et que je n'aurais que ce que j'avais mérité en me plaignant une fois arrivé au bout...

Mais ce troisième livre de Briggs est, semble-t-il, celui qui a fait le  déclic entre une écrivaine débutante et une artiste stylée et douée... Tous les ingrédients qui font d'elle, à mes yeux, une auteur d'exception, sont enfin présents : le travail des liens entre les personnages, la force des  liens familiaux, les notions d'apparence trompeuse et de charme mystérieux, la profondeur de l'historique des héros et un casting redoutable de seconds couteaux multidimensionnels. Rien que pour assister à cette naissance d'une artiste, cela valait la peine de risquer une mauvaise lecture. Je ne suis pas déçu, loin de là. Et j'ai une furieuse envie de relire Corbeau, pour y  retrouver avec délices les souvenirs gourmands de ma première découverte... Chapeau !

lundi 17 mars 2014

Les domestiques, de Michael Marshall Smith

Il m'est arrivé lors de la lecture de ce court roman une bien étrange aventure qu'il me semble intéressant de narrer. Je l'avais repéré lors de sa sortie, il y a déjà quelques temps. Pour une raison inconnue de ma part, je n'ai pas relu son quatrième de couverture lorsque j'en ai finalement entrepris la lecture. Au départ de la couverture, qui me faisait penser aux films de fantômes les autres, j'ai cru avoir en main un livre d'horreur, ou à tout le moins d'épouvante.
Ça tombait bien, depuis ma  relecture de l'intégrale de Lovecraft l'année passée, je n'avais plus abordé ce genre. Mais je dus déchanter : j'étais arrivé à plus de la moitié du roman que les rares événements fantastiques n'avaient encore éveillé en moi qu'un vague sentiment de frisson et de malaise, rien de plus.
Je n'arrivais donc pas du tout à comprendre l'intérêt de cet ouvrage quand j'eus la bonne idée d'enfin en relire ce résumé : il s'agissait d'une fable fantastique ! Immédiatement, de nombreux éléments firent sens. Le rythme lent, presque hypnotique dans sa torpeur, était en fait une poésie sur la vie quotidienne. Les fantômes peu actifs étaient en fait une  splendide métaphore sociale et analogique. Ce qui paraissait raté et soporifique était en fait un récit subtil et délicat, et j'en avais omis  toutes les qualités.
Je ne dirais pas pour autant qu'il s'agit d'un chef-d'oeuvre, mais il s'agit d'une oeuvre remarquable, progressant par touches à la façon d'un Stephen King mais sans ses longueurs, dépeignant un drame familial par non-dits, sans tomber dans le macabre ni le glauque, mais en travaillant sur les sentiments et les comparaisons comme la vie aime parfois en faire, bien souvent pour une plus grande souffrance.

Ainsi donc, la façon dont on caractérise un livre et comment on le classe mentalement peuvent interférer sur la manière dont on le lit et l'apprécie... Résumé, avis, couvertures semblent  nous guider dans les cases de notre esprit analytique, parfois au détriment de notre plaisir... Étonnant, non ?

dimanche 16 mars 2014

Charlotte Collins, de Jennifer Becton

Dans sa collection Romance, Milady publie toute une série de romans régence sur l'univers de Jane Austen. Certains sont très réussis, d'autres moins,selon l'auteur et le personnage de base. Je me suis attaqué à celui sur Charlotte Collins, la meilleure amie d'Elizabeth Bennet, qui épousa l'ennuyeux pasteur Collins.
Dans Orgueil et préjugés, Charlotte n'est qu'une simple vignette, visant à illustrer la condition des femmes de bonne famille mais n'ayant pas de fortune et n'ayant donc guère de choix :  rester vieilles filles ou se marier à qui veut bien d'elles.
N'ayant pas eu de grand amour providentiel mais ne voulant pas être une charge pour ses parents, Charlotte fait le second choix et s'enchaîne à un barbant personnage pour survivre.
Jennifer Becton prend donc un parti difficile, celui de choisir un personnage terne et gris, alors quand dans la galaxie austenienne, il y a avait des choix plus motivants. C'est un peu ce qui m'a attiré vers cet ouvrage : le défi lancé à elle-même par l'auteur.
L'intrigue est de bonne facture, la romance posée et séquentielle, même si le style n'est, à mon sens, pas à la hauteur d'une roman régence. Néanmoins, la tranquillité émanant du rythme lent et calme permet de se fondre dans le personnage et l'univers de façon convaincante. On pourrait y trouver une espèce d'étrange d'ennui, mais voulu, mesuré et apportant une touche de confort, comme un thé  chaud quand il pleut dehors. L'effet est un peu déroutant, voire décourageant, au début, mais il colle parfaitement à l'héroïne, si prisonnière des conventions de son époque.
Lecture à recommander, donc, changeant des romans régence habituels, de par son héroïne gris terne, qui accentue à mon sens un réalisme parfois trop léger du genre.

La diseuse d'ombres, de Sandy Williams



J'ai récemment décidé de me replonger dans les séries bit-lit des éditions Milady et voici mon premier choix : le premier tome de la série Sidhe : La diseuse d'ombres, de Sandy Williams.
Vous aimerez sans doute cette série si vous êtes fan de Mercy Thompson, des Chroniques de MacKayla Lane, ou d'autres séries de bit-lit. Le style est très imprégné des impératifs habituels de la paranormal romance, à savoir une héroïne ayant un pouvoir étrange et courtisée par deux séduisants personnages, chacun ayant son style et une affiliation totalement opposée à son rival.


Ce qui m'a plu :

- l'héroïne est d'un caractère assez impétueux, mais aussi pleine d'irrésolution quand à son existence. Ce balancement est assez réussi et permet au rythme de l'intrigue de  progresser sans temps mort, tout en enrichissant la romance au cœur de l'histoire.
- la rivalité politique entre les deux "charmeurs" paraît assez manichéenne au départ, mais se complexifie sans pour autant tomber dans les lourdeurs caractéristiques de la Fantasy classique. On reste dans une lecture légère,rapide, qui n'apporte pas plus u'elle ne promet, mais ne déçoit pas.
- pas trop de scènes explicites, ce qui habituellement est un défaut majeur du genre quand elles sont mises n'importe où, juste pour réveiller l'attention mais sans respecter le sens de l'histoire.


Ce qui m'a déplu :

- les Fae de l'histoire ne sont guère différents des humains, en-dehors de leur côté conservateur et de leurs pouvoir magiques limités. On croirait être face à des humains d'une autre dimension. Ce n'est pas forcément un mal, mais enlève une touche de glamour au terme Fae.
- Paradoxalement, ce sont les humains de l'histoire qui semblent les plus unidimensionnels, notamment les miliciens. Mais bon, je suppose qu'ils acquièrent plus de profondeur dans les livres suivants, ce qui est fréquent dans le genre.


En conclusion, une lecture typique du genre, qui permet de s'évader et de faire travailler son imaginaire, mais pas non plus un livre phare, qui marque les esprits et qu'on aime relire des années après pour en pénétrer la sagesse. Il n'en avait pas la prétention, de toute façon. Bref, un bon choix pour les amateurs du genre.

Introduction du lecteur...

Je ne me souviens pas avoir fait autre chose que lire. Depuis tout petit, je dévore, me délecte, plonge dans d'autres univers et n'en ressors jamais le même...
Ma passion est devenue un métier, puis un plaisir d'encourager d'autres à découvrir la voix qu'ils avaient en eux. Je lis les premiers jets d'auteurs parfois timides et je les aide à découvrir les beautés de leur imagination.

Je partage ici mes lectures, bonnes ou mauvaises. Par ce biais, je vous invite à vous poser des questions sur ce que vous lisez. Pas une analyse froide et scolaire, mais une interrogation sur les sentiments qui naissent en vous quand vos yeux parcourent les lignes et quand votre imagination s'en empare, créant les plus fabuleuses scènes dans votre coeur...

Bonne lecture !